Jazz pour tous (Boris Vian)
octobre 15, 2018
Livre-disque numéro zéro
AVANT-PROPOS
Avec la nouvelle série Jazz pour tous, que nous inaugurons ici par un livre-disque donnant une histoire abrégée du jazz, nous avons voulu mettre entre les mains du public, pour la première fois à un prix abordable, les classiques célèbres de la musique de jazz et les interprétations des plus grands musiciens de jazz vivants. Nous nous sommes attachés à ne conserver que des noms ayant depuis longtemps rallié les suffrages de l'ensemble de la critique. Ce sont vraiment des musiciens indiscutés dont vous trouverez les œuvres sous notre label Jazz pour tous. On dispose aujourd'hui de suffisamment de recul pour apprécier les efforts des pionniers ; des noms comme ceux de King Oliver, de Duke Ellington, de Johnny Dodds, de Kid Ory ou de Louis Armstrong, pour ne citer que cinq des vedettes à qui sont consacrés nos premiers recueils, sont mondialement connus et respectés. Voici, à la portée de votre bourse, une base inébranlable pour vous familiariser avec ce phénomène international de notre siècle, le jazz.
HISTOIRE ABRÉGÉE DU JAZZ
EN MATIÈRE D'INTRODUCTION
“Le jazz, c'est comme les bananes, ça se consomme sur place”, a écrit Sartre quelque part. Opinion très défendable à l'époque où elle fut formulée ; mais Sartre avait compté sans les progrès techniques et l’avènement du microsillon haute fidélité. Nous vivons aujourd'hui en un temps où l'on peut transporter les bananes ou les mangues par avion, et mettre en conserve le jazz avec toutes ses qualités intactes.
Nous irons même plus loin ; tandis qu'un concert reste une performance éphémère, le disque permet, mieux que le contact direct, de se familiariser avec le jazz.
Nous avouons par le choix même de ce terme qu'il y a quelque chose, dans le jazz, qui risque d'échapper à l'auditeur non informé.
Et c'est pour faire de cet auditeur “vierge” un auditeur avisé que nous nous proposons de l'éclairer, tant par le texte que par le disque, sur le mystère du jazz.
Car mystère il y a, tout au moins dans l'esprit d'un certain nombre de critiques qui sévissent à longueur de colonne dans la presse. A l'exception des revues spécialisées et d'un ou deux très rares journaux où le responsable sait “de quoi il retourne”, il est impossible de trouver dans une publication française un article sur le jazz qui ne contienne pas d'erreurs. Et nous ne parlons même pas des erreurs de jugement que nous n'avons pas à redresser, chacun étant libre de ses goûts ; mais de ses simples fautes d'information grossières qui font d'Ellington un trompettiste, de Bechet un pianiste, de Gerry Mulligan un musicien noir...
Mais voilà que nous commençons à citer des gens dont vous n'avez, peut-être, jamais entendu le nom...
Patience on va vous “affranchir ”, comme on dit dans la Série noire.
I) Qu'est-ce que le jazz ?
Le jazz est ce qui résulte de l'interprétation par un musicien de jazz, d'une pièce musicale prise pour thème.
Lapalissade qui nous ramène immédiatement au problème initial, à cela près qu'il s'agit de définir le musicien de jazz.
Mais cette lapalissade nous permet de considérer ce problème de la même façon qu'il s'est posé historiquement, car les musiciens de jazz ont fait du jazz avant de savoir ce qu'ils faisaient ; nouveaux Jourdain, ils ont créé avant d'analyser.
Il en va de même dans tout art : le besoin de s'exprimer précède l'expression, et l'exégèse vient ensuite.
le jazz est une manière de jouer. Tout comme un grand soliste classique a besoin d'une longue familiarisation avec l'œuvre et la pensée des maîtres pour arriver à devenir un interprète digne de ce nom, le musicien de jazz, ou jazzman, doit posséder une connaissance parfaite, acquise ou partiellement intuitive, des traditions de son art.
Et pour donner une idée sommaire ; il nous paraît utile de faire un résumé de l'évolution du jazz.
II) Le maître mot
Sur l'origine du mot “jazz” lui-même, les historiens ne sont pas tous d'accord. Selon divers fantaisistes, le terme a été tantôt forgé dans le tumulte de conversations de bar, tantôt dérivé du nom d'un certain Jasbo Brown, etc. D'autres lui accordent une étymologie purement française : jazz viendrait de jaser il s'agirait d'une conversation entre les instruments. Selon l'anthropologue Borneman, dont l'avis semble déjà plus sérieux, “Jazz” a une signification nettement sexuelle et dérive d'un dialecte ouest-africain. L'historien du jazz Goffin semble apporter une preuve péremptoire de ce sens dans son HISTOIRE ou JAZZ et il cite à cet effet un document concluant.
Bref vers 1916 apparaît la forme archaïque “Jass” qui n'est encore qu'un mot à la mode, sans plus d'importance que les qualificatifs divers dont se parlent les orchestres syncopés jusqu'ici (tels que “jug band”, “spasim band”, etc.). Tout au long de l’histoire de cette musique naissent ainsi des appellations éphémères. On verra plus tard apparaître la “hot music”, la “swing music”, le “bop”, le “cool” à la différence de tous ces termes, jazz est resté, en marge des modes, pour désigner dans son ensemble une certaine musique dont l'origine remonte aux alentours de 1900.
III) La préhistoire du jazz
Il est admis aujourd'hui que le jazz est une musique créée par les Noirs qui s'est développée à La Nouvelle-Orléans vers le début de ce siècle. Pourquoi à La Nouvelle-Orléans ? Le rachat de la Louisiane par l'Amérique à la France n'avait pu empêcher qu'il subsiste en cette région une atmosphère plus latine que dans le reste des Etats-Unis ; la ségrégation, c'est-à-dire la séparation des Noirs et des Blancs, y était un peu moins rigoureuse qu'ailleurs, ce qui permettait aux Noirs un contact plus aisé avec la musique de l'époque; d'un autre côté, ce grand port comportait, comme toutes les escales importantes, une multitude de lieux de plaisir à l'usage des matelots et la musique combinée à l'alcool et aux femmes a toujours été considérée comme un des meilleurs moyens de vider le portefeuille de celui qui en a un. Bref, La Nouvelle-Orléans était une sorte de capitale des Noirs et elle vit naître spontanément son Conservatoire.
Mais quel étrange Conservatoire !
Parmi les premiers musiciens dont l'histoire du jazz ait retenu les noms figurent en bonne place les trompettes Emmanuel Perez et Buddy Bolden, le barbier légendaire mort fou en 1931, et le grand pianiste de “ragtime” Tony Jackson. Le piano et l'orchestre sont séparés à cette époque : les orchestres sont surtout des orchestres de marche ; les musiciens ont appris à jouer un peu au petit bonheur, d'oreille, avec cet instinct rythmique qu'ils ont préservé depuis leur esclavage. Il y a une vie sociale très développée : aux mariages, aux enterrements, aux cérémonies maçonniques, aux pique-ruques, on convoque des orchestres qui sont souvent transportés sur des voitures. Parfois deux orchestres rivaux s'accrochent en ville et font un véritable tournoi : au gagnant les clients.
On n'a pas encore inventé l'amplificateur et sitôt qu'un certain nombre de gens se réunissent, il faut des poumons vigoureux pour se faire entendre; au reste, l'instrumentation de l' époque est sensiblement celle des fanfares et orphéons. La basse à cordes n'a pas encore conquis droit de cité; la basse à vent prédomine. Le public est ravi par la robuste jovialité de cette musique fraîche et rythmée. Peu à peu, les goûts s'affinent et la concurrence crée le progrès technique. Le piano se généralise dans les “boîtes” de l'époque : les bordels du quartier réservé de Storyville. Des orchestres célèbres se forment : l’Olympia Band où jouent le clarinettiste Picou et le trompette Keppard, l'Eagle Band, le Magnolia Band fondé par le célèbre Joe Oliver, où opèrent le trombone Kid Ory et le clarinettiste Johnny Dodds. Les musiciens travaillent et nombre d'entre eux commencent à se cultiver.
Il est d'usage de faire remonter à la fermeture du quartier réservé, en 1917, le développement et l'éparpillement du jazz. En réalité, dès 1910, de grands musiciens ont porté le message du ragtime à travers l'Amérique ; ainsi Louis Mitchell et ses Seven Spades. La fermeture de Storyville ne fait qu'accélérer le processus : réduits au chômage, des dizaines de musiciens sont contraints de s'expatrier pour chercher du travail. Nous sommes en 1917. Le jazz remonte le Mississippi et va gagner le centre de l'Amérique.
IV) Le monde découvre le jazz
C'est vers 1920 que le monde prend réellement conscience du phénomène jazz.
Chose flatteuse pour l'Europe, le mérite de la découverte de son importance par les critiques revient essentiellement à Eugène Ansermet et Robert Goffin ; à la même époque, en Amérique on enterre férocement le jazz (ainsi qu'on peut le constater en lisant les citations publiées par Barry Ulanov dans son HISTOIRE ou JAZZ). C'est d'ailleurs en Amérique, berceau du jazz, que l'on a écrit le plus d'inepties à son sujet. Il est bon d'ajouter que, dès cette époque, le faux jazz commençait à envahir le marché, tandis que le vrai restait musique d'initiés mais prenait solidement racine et se trouvait de vigoureux défenseurs.
La période de 1920 à nos jours constitue véritablement la période fructueuse du jazz ; en effet, on possède des enregistrements des grands musiciens depuis 1920 et l'on peut, compte tenu, naturellement, des progrès techniques de la prise et de la reproduction des sons, juger sur pièces.
Quant à l’histoire du jazz de cette période, elle fait déjà l'objet d'un nombre énorme de publications et nous ne pouvons envisager de la résumer ici, nous bornant à renvoyer le lecteur aux ouvrages cités dans la bibliographie. Nous nommerons dans ce qui suit les musiciens les plus importants, et nous nous proposons maintenant d'étudier le problème à la fois historiquement, et d'un point de vue “utilitaire”. Quels ont, depuis 1900, été les apports créateurs des grands musiciens qui ont fait l’histoire du jazz ? Ainsi, nous définirons son évolution.
Grosso modo, on peut diviser la période 1900-1956 en cinq époques :
1900-1917 — Naissance du jazz. Développement de l'improvisation collective (style Nouvelle-Orléans).
1917-1935 — Apogée et déclin du style Nouvelle-Orléans.
Apparition des solistes, des arrangeurs, des grands orchestres et des formations de studio.
1935-1943 — Apogée du style des grands orchestres dits “swing”. Accession des solistes au rang de virtuoses. Premières traces de réaction.
1943-1955 — Développement et apogée d'un nouveau style dit “bop”. Réapparition du style Nouvelle-Orléans. Apparition du phénomène “cool” et d'une musique de techniciens purs.
1955 et la suite ? Époque actuelle sans commentaires ; ils seraient un peu prématurés.
Ces dates ne sont pas choisies au hasard ; bien qu’évidemment chaque période déborde sur la précédente et la suivante, mais voici leur signification :
1900, c'est la naissance de Louis Armstrong.
1917, c'est la date du premier enregistrement dénommé jazz, par l’Original Dixieland Jass Band.
1935, c'est l'année du triomphe du grand orchestre “swing” de Benny Goodman.
1943, c'est la mort du grand pianiste de jazz Fats Waller.
1955, c'est la mort du saxophoniste alto Charlie Parker.
Examinons en détail ce que chacune de ces époques a amené au Jazz.
1) PÉRIODE 1900-1917 : NAISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DE L'IMPROVISATION COLLECTIVE
Pour un certain nombre d'amateurs et de critiques attardés, hors de l'improvisation collective qui caractérise le style dit “Nouvelle-Orléans”, point de salut. Selon eux, c'est cela la quintessence du jazz, c'est le jazz à l'état pur. Or on est bien obligé de reconnaître en y regardant d'un peu plus près que si les grands musiciens N. O. ont créé une musique passionnante, c'est bien malgré son impureté.
Le jazz primitif est nourri d'emprunts au folklore, au chant religieux, à la musique de danse, aux marches en vogue. C'est d'ailleurs ce qui prouve sa robustesse : il faut un estomac solide pour digérer pareil ragoût. Et qu'y a-t-il de gênant à cela ? On n'a jamais exigé d'un écrivain qu'il invente un alphabet ou un dictionnaire. C'est faire œuvre créatrice que d'assembler de façon originale des éléments épars.
Foin donc du mythe de la pureté.
Essentiellement, le jazz N. O. est une musique à quatre temps dont le caractère original est d'être fondé sur l’improvisation collective.
Que ceci soit né, comme d'aucuns le disent, d'une incapacité des premiers jazzmen noirs à lire la musique, ce qui les obligeait à jouer d'oreille (on les appelait des “fakers”, des truqueurs), c'est possible ; il est certain en tout cas que, dès cette époque, on comptait parmi les Noirs de remarquables musiciens, quand ce ne seraient que les compositeurs de ragtime.
Toujours est-il qu'il y a improvisation collective. On s'exclame : pas étonnant que cela donne une telle cacophonie !
Pas si vite.
La formation traditionnelle Nouvelle-Orléans, qui opère fréquemment comme orchestre de marche, comporte :
- un cornettiste (ou trompettiste, ou bugle),
- un trombone,
- une clarinette,
- une section rythmique composée d'une batterie, d'un banjo et d'une basse à vent. Le piano s'y ajoute parfois s'il s'agit d'un orchestre fixe.
(Inutile de préciser que cette composition n'a rien d'absolu et que cette tradition n'en est une que dans l'esprit des traditionalistes ; ce qu'on peut dire, c'est qu'elle. se rencontre souvent, ce qui n'est déjà pas mal.)
Le thème à interpréter peut être un blues (succession de 12 mesures selon une progression harmonique bien définie), une marche, une chanson à la mode, etc. Une chanson type américaine (de nos jours, les chansons à succès françaises se construisent fréquemment de même) est généralement bâtie sous forme d'un couplet de 16 mesures et d'un refrain de 32 mesures divisées en 4 fois 8 mesures. (Les formes AABA ou ABAB sont les plus répandues ; dans la première, les huit mesures B sont dites : “le pont”). Les orchestres Nouvelle-Orléans font un usage fréquent du ragtime, de formule généralement plus compliquée, en ce sens que plusieurs thèmes se succèdent dans le même morceau. Les 32 mesures habituelles y sont souvent entrelardées de séries de 12 mesures blues.
Le thème choisi, les voix se répartissent de la façon suivante.
Le trompette mène le jeu, s'éloignant peu du thème qu'il expose.
La clarinette lui fait dans !'aigu un contre-chant volubile.
Le trombone, dans le grave, exécute un contre-chant jouant souvent le rôle de base mélodique.
La section rythmique fournit à l'ensemble une pulsation régulière agrémentée de syncopes simples. (Le deuxième et le quatrième temps de chaque mesure reçoivent une accentuation distincte.) En même temps, la section fournit aux mélodiques les harmonies sur lesquelles chacun crée sa propre partie.
C'est là ce que l'on appelle improvisation collective; l'on voit qu'il s'agit d'une improvisation limitée, puisque l'on reste dans le cadre d'harmonies très simples dont la succession est parfaitement connue des exécutants.
Comme eût dit l'immortel Agénor Fenouillard, la réussite de l'ensemble dépend du talent de chacun des interprètes et de leur degré d'entente ; mais on conçoit cependant qu'il s'agit là d'une musique très directe, très franche et qui pour cette raison est accessible aux néophytes. Souvent, malheureusement, même lorsqu'ils se trouvent devant les musiciens médiocres : la satisfaction de “comprendre” leur fait perdre tout sens critique. En réalité, une collective réussie est rare, et ceux qui s'essaient au style N.O. le savent bien, qui copient note pour note les chefs-d'œuvre des vieux maîtres...
2) PÉRIODE 1917-1935
Apogée et déclin du style N.O. Apparition des solistes, des arrangeurs, des grands orchestres, des formations de studio. Premiers orchestres blancs.
Comme nous l'avons dit, la réussite d'une bonne collective N.O. dépend du talent des interprètes. Il est difficile de trouver les hommes dont les talents soient exactement équilibrés et, ceci supposé réalisé, il est difficile de conserver l'orchestre dans ces conditions : si chacun a le talent d'un soliste, il est amené à désirer sa propre formation.
D'où l'apparition inéluctable d'orchestres centrés autour d'une personnalité dominante.
Ainsi l'improvisation collective traditionnelle cède-t-elle la place au solo accompagné. Ce n'est pas à dire que le solo n'ait jamais existé ; il y a tous les degrés de la collective réelle au solo accompagné... Il existe même des exemples de solos sans aucun accompagnement (Hawkins enregistré par Norman Granz).
Ainsi, tout en restant dans l’esprit Nouvelle-Orléans, un groupement comme celui d'Armstrong de 1925 à 1927 s’éloigne-t-il de la formule “collective” pour laisser d'admirables improvisations en solo.
Parallèlement à cette modification du style traditionnel, il existe une autre solution pour passer outre à l'absence d'improvisation mélodique de certains des hommes de l'orchestre c'est celle qui consiste à faire écrire, par un homme de grand talent, les parties de tous les musiciens.
Cette solution (découverte il y a un bout de temps par les musiciens classiques) ne se développa dans Je monde du jazz qu'à partir des années vingt. Il va de soi qu'elle était réalisable à condition de disposer de musiciens capables de lire ; et à part les pianistes, une grande majorité de jazzmen, jusqu'à cette époque, étaient illettrés musicalement, cela dit sans aucune intention péjorative : un instinct musical comme celui du guitariste français Django Reinhardt, illettré lui aussi, suffisait à faire de lui un soliste génial mais le limitait nécessairement au solo sauf complications énormes exemple de sa messe.
Les thèmes joués restant du même genre, on assiste donc à la naissance de l'arrangement écrit et à l'apparition d'un nouveau personnage, l'arrangeur, qui fréquemment, dirigea l'orchestre.
L'orchestre s'étoffe et se divise en sections : section des cuivres (trompettes et trombones), section des anches (saxos et clarinettes), section rythmique (batterie et percussions, guitare, basse et piano).
Les premiers grands arrangeurs sont Jelly Roll Morton, Fletcher Henderson et Duke Ellington. Tous trois dirigent leur propre orchestre.
On n'ira pas conclure, surtout, que le fait de disposer d'une partition écrite suffit à permettre à n'importe quel bon technicien d'un instrument de jouer du jazz.
En effet il est presque impossible de noter, sauf extrême complication, la “façon” dont il faut jouer une partie écrite ; on use donc de signes conventionnels et seul un musicien nourri de la tradition du jazz est capable de jouer correctement une partie d'instrument de jazz. Cela a été si loin qu'on a pu lire sur un arrangement : “pesant à la Yes indeed”.
(Yes indeed est un arrangement que fit Sy Oliver pour l'orchestre de Tommy Dorsey et qui a effectivement un tempo très caractéristique. De toute évidence, il faut le connaître pour comprendre la notation !).
Il n'en va pas différemment en musique classique ; mais le rôle du chef y est plus capital; c'est de lui que dépend la nature de l'interprétation, plus que dans le jazz où elle incombe plutôt à l'arrangeur qu'au chef (d'ailleurs souvent confondus).
Mais puisque nous nous occupons de cette période des années 17-35, notons qu'à l'imitation des grands musiciens noirs, quelques Blancs s'efforcent alors de jouer jazz. Sans parler du ridicule groupement de Paul Whiteman, prototype du faux orchestre de jazz ( qui contribua à troubler les idées européennes autant que les idées américaines elles-mêmes), on trouve en Bix Beiderbecke, Jimmy McPartland, Muggsy Spanier, Joe Sullivan, etc., des qualités remarquables. Signalons enfin un phénomène curieux, celui de l'apparition d'orchestres fantômes, réunis pour l'enregistrement uniquement et qui n'existent que sur disques (Hot Five d' Armstrong, groupements de Fats Waller).
3) 1935-1943 : APOGÉE DU “SWING” SOLISTES VIRTUOSES LA REACTION
Le grand orchestre, on l'a vu, est né dès la période 17-35 et nous avons cité les trois plus fameux. Deux faits nouveaux sont apparus entre-temps dans le domaine de la technique : le développement de l'enregistrement électrique et celui, fabuleux, de la radio. La demande de musique populaire est colossale ; et il se trouve que la musique populaire américaine est essentiellement, comme le jazz, une musique à 4 temps, ce qui va faciliter au jazz la pénétration du gros public. Cependant, il existe un racisme extrêmement fort aux USA, et les orchestres et musiciens blancs ont un accès bien plus aisé à la radio que les Noirs.
On ne s'étonnera donc pas que les années 35-40 soient dominées dans l'esprit populaire par les noms de grands orchestres blancs alors qu'indiscutablement dans l'esprit du spécialiste ces formations célèbres n'existent littéralement pas à côté des formations noires et des musiciens noirs. Citons cependant Benny Goodman, dont un des principaux mérites a été d'introduire dans son orchestre de grands musiciens noirs - mérite assez astucieux à la longue, puisque nombre de ses disques ne valent que par les solos de ces musiciens. Citons encore Glenn Miller, qui dut une bonne part de son regain récent de popularité à sa disparition tragique en service commandé durant la dernière guerre. Ces deux orchestres ont de nombreux points communs : ce sont d'excellentes mécaniques un peu ternes, qui exécutent avec précision des arrangements souvent fort bons. (Benny Goodman fit fréquemment appel aux services de Fletcher Henderson, Mary Lou Williams et d'autres grands arrangeurs noirs.) Il n'en reste pas moins que si ces deux noms dominent la scène, la valeur de leur réalisations est cent fois inférieure à celle des grands chefs noirs de l'époque, Duke Ellington, Jimmy Lunceford, Count Basie, Chick Webb et même, souvent, Cab Calloway.
Tous ces orchestres ont un répertoire d'arrangements relativement compliqués, écrits en vue de dégager le maximum de “swing”, parfois fourmillants de “riffs” (Count Basie) et qui laissent aux solistes un rôle assez important, mais limité à de courtes improvisations (8, 16 ou 32 mesures, rarement plus). C'est ce rôle des solistes qui distingue les orchestres d'alors de ceux qui, récemment, ont tenté de recréer leur style. Une formation comme celle de Billy May, qui a repris sans vergogne l'atmosphère Lunceford, s'en distingue par le caractère mécanique d'exécutions auxquelles il manque pour les réhausser les solistes de classe qu'étaient Willie Smith, Trummy Young, Sy Oliver, etc.
De tous les grands orchestres “swing” de la période 35- 43 émerge, comme d'habitude, celui d'Ellington. En réalité, Ellington doit toujours être classé dans une catégorie à part. La richesse et la couleur de ses arrangements, l'incomparable étendue de sa “palette” sonore en font un être unique dans le monde du jazz. Les solistes qu'il a révélés ont rarement été dépassés en grand orchestre.
Le rôle de l'arrangeur, est-il besoin de le répéter, est déjà capital à cette époque, et il ne fera que s'accentuer au fur et à mesure de l'évolution du grand orchestre, évolution qui se poursuit de nos jours.
Rythmiquement parlant, la période 35-43 est la grande époque du “four to the bar ”, quatre battements égaux par mesure.
4) PÉRIODE 1943-1955 : LE BOP — LE REVIVAL — LE COOL
LES “PROGRESSISTES”
Comme le remarque le critique Leonard Feather dans lNSIDE BEBOP, le jazz se trouvait, vers 1940, dans une énorme ornière commerciale. Voici quels sont ses propres termes, qui exposent très clairement la situation :
Toute imagination des arrangeurs et des solistes de cette époque ne peut dissimuler ce fait que le monde musical gigantesque du jazz, avec ses millions de notes jouées chaque soir par ses milliers de musiciens par le monde, reposait entièrement sur une utilisation limitée des douze notes de la gamme chromatique :
Le jazz était construit en totalité sur les accords majeurs, mineurs de septième et de septième mineure de chacune de ces douze notes ; ajoutons-y les accords augmentés et diminués, une septième majeure de çà et là, et quelques variantes très réduites ; rythmiquement, le jazz se résumait aussi à quelques syncopes simples fondées sur l'immuable quatre-battements-par-mesure.
Inconsciemment gênés par ces limitations qui n'existent pas, il faut bien le dire, en musique classique, des musiciens jeunes et pleins d'audace se mirent, dès cette époque, à chercher du nouveau. Le saxophoniste Lester Young avait été un des premiers à rompre les conventions ; lui s'était attaqué au problème de la sonorité. Le style de saxo ténor était dominé par Coleman Hawkins à la sonorité ronde, chaude et passionnée ; Lester Young tirait de son instrument un tout autre genre de musique ; apparemment terne et plat, avec un phrasé étrangement découpé, son jeu détendu et discret ouvrait de curieux horizons. C'est dans le bistro d'un ancien saxo, Henry Minton, que les recherches de plusieurs jeunes se cristallisèrent et aboutirent à de passionnantes découvertes. Le guitariste Charlie Christian, le drummer Kenny Clarke, le trompettiste Dizzy Gillespie, le pianiste Tadd Dameron et un jeune saxo alto de l'orchestre de Jay Mc Shaun, Charlie Parker, ainsi que Thelonious Monk, une étrange figure du jazz qui est aussi un pianiste très singulier, peuvent être considérés comme les premiers à avoir franchi l'étape qui devait aboutir au jazz actuel.
Et qu'est-ce que le bop ?
Le bop en soi n'existe pas ; les journalistes, avides de mots à la mode se sont empressés de coller cette étiquette sur des choses très diverses et de faire régner la confusion. (Les journalistes apprécient énormément la confusion car elle leur permet de dissimuler leur ignorance totale des sujets qu'ils traitent sans être qualifiés pour le faire ; naturellement, tous nos amis font exception à cette règle !).
Si l'on veut absolument mettre quelque chose sous l'étiquette, on peut dire que les musiciens de la nouvelle école,
1) restaient dans la pure tradition du jazz, recourant notamment au blues, et ceci très souvent, mais :
2) introduisaient des déviations et des variations harmoniques à la suite d'accords traditionnels du blues ou des chansons qui leur servaient de thèmes,
3) développaient l'indépendance des rythmes créés par la section rythmique pour aboutir à une polyrythmie. (Kenny Clarke appelle “indépendance coordonnée” la qualité que doit selon lui posséder un batteur moderne.) Paradoxalement, ils revenaient partiellement au “two-beat” de La Nouvelle-Orléans.
Quant au “phrasé bop”, disons immédiatement qu'il est la vulgarisation du phrasé original des grands créateurs, Clarke, Parker et Dizzy Gillespie notamment. Qu'ils aient été aussi largement et immédiatement imités n'est qu'une preuve de la rapidité de transmission des idées musicales grâce à la radio et au disque.
Toutes les trouvailles mélodiques, harmoniques et rythmiques des créateurs des années quarante ont été assimilées, digérées, notées, et ont donné naissance à un nouveau style d'arrangements ; des arrangeurs de très grande classe se sont ainsi révélés, comme Walter Fuller, John Lewis, Tadd Dameron.
Le cool
Ce que l'on nomme le bop est-il le seul apport de cette période ?
Loin de là. Le “cool” va suivre.
“Cool ” (frais), est un mot choisi à l'opposé de “hot ” (brûlant), épithète fréquemment accolée au jazz de 20 à 40.
Cela désigne surtout, au fond, une évolution de la sonorité. La sonorité des premiers jazzmen est très éloignée de la sonorité classique, surtout en ce qui concerne les instruments de cuivre et les saxos ; les premiers, considérés comme non expressifs par la musique sérieuse, ont acquis, aux mains des jazzmen, une expressivité très remarquable. Les années 40 à 50 réagissent contre la véhémence et le lyrisme en venant à une sonorité plus mate, plus terne en apparence, mais qui permet de mettre en valeur la complexité accrue de la musique interprétée. La virtuosité s'accommode mal des amples vibratos et des volumineuses sonorités. Le timbre d'un Miles Davis à la trompette rompt ainsi totalement avec celui d'un Armstrong.
Des musiciens nourris de classique et dénués d'inspiration mais doués d'une technique solide se sont jetés là-dessus comme la fortune sur les audacieux, mais ils n'ont produit qu'un faux jazz extrêmement ennuyeux dont nous nous efforcerons d'éviter les exemples... Il est constant que de faux artistes s'imaginent que copier la forme est le moyen d'arriver à l'art. Ne revenons pas sur cette erreur funeste, et défenestrons les imitateurs.
Les revivalistes
A propos d'imitateurs, profitons-en pour parler des revivalistes, curieux personnages nés à peu près avec l'année 1940.
Ceux qui avaient vingt ans à l'époque où le style Nouvelle-Orléans apparut comptent parmi leurs rangs une solide proportion de gens dont l'oreille s'est révélée incapable de suivre l'évolution du jazz et de s'ouvrir aux découvertes nouvelles des créateurs.
C'est pour eux ou par eux, peu importe, que le mouvement du “revival” a vu le jour.
Phénomène typiquement blanc, le New New Orleans (Nouvelle-Nouvelle-Orléans, que nous pourrions appeler “Nounou ” pour abréger) ou néo-Dixieland fait appel à l'improvisation collective traditionnelle et aux thèmes joués par les vieux maîtres, King Oliver en particulier.
C'est une tentative de résurrection d'une musique que ne pratiquent plus, parmi les Noirs, que ses rares créateurs encore en forme, au nombre desquels on doit citer le légendaire Sidney Bechet. Quant à Louis Armstrong, un génie comme le jazz en compte peu, on ne peut dire qu'il joue dans le style Nouvelle-Orléans : Armstrong, bien ou mal entouré, est toujours de cent coudées au-dessus de ceux qui l'entourent, même lorsque ce sont des “cracks”, et il joue de l’Armstrong.
Le Dixieland n'exige pas, pour sa pratique, une technique extraordinaire. Il est d'abord aisé, son côté un peu fanfare et entraînant plaît aux non-initiés, et il a le mérite d'amener au jazz véritable un certain nombre de “fans” (ou fanatiques). Mais parmi les plus acharnés de ses supporters, souvent se glisse insidieusement le virus de l'évolution technique, et un échantillon remarquable en est donné par un enregistrement de Condon récemment paru. Disque excellent... où le batteur joue dans un style beaucoup plus moderne que les puristes ne l'admettent en principe. (En principe ; car à l'audition, ce disque ne leur déplaît pas du tout, loin de là !...)
L'intérêt du NouNou est de permettre aux jeunes d'entendre, en chair et en os, des petits groupements dont certains arrivent à “sonner” comme les groupements traditionnels de jadis dont les enregistrements sont rares et de faible qualité. Artistiquement parlant, son apport est nul. (Commercialement parlant, c'est une autre histoire.) Dans l'ensemble, on peut reprocher aux revivalistes de confondre bruit et musique. Il n'est pas sans intérêt de noter, comme le faisait récemment le spécialiste réputé William Russell, que les primitifs de La Nouvelle-Orléans créaient souvent en collective une musique très douce dont la mélodie n'était jamais absente. On voudrait que certains groupements braillards se pénétrassent de cette vérité utile.
5) LE JAZZ ACTUEL
Le jazz actuel, c'est un certain nombre de noms; et le propriétaire de chacun de ces noms a quelque chose à dire, quelque chose de nouveau à apporter à l'édifice construit peu à peu depuis ces années 1900 où Buddy Bolden, trompette au poing, appelait ses fidèles au bal du jazz. Le jazz actuel, c'est Erroll Garner, l'inimitable pianiste qui mit au point ce savant décalage de la main droite sur la main gauche, créant ainsi une nouvelle manière de “swinguer”, d'un attrait irrésistible. Le jazz actuel, ce sont tous ceux qui, de Gerry Mulligan à Milt Jackson, de John Lewis à Miles Davis, enrichissent de jour en jour le jazz de sonorités nouvelles, de recherches inédites, de rythmes inconnus. Le jazz actuel, ce sont les futurs génies qui naissent peut-être aujourd'hui et qui seront bercés à leur naissance par cette masse déjà colossale de résultats, évolution des efforts conjugués de deux races ; car le jazz, outre qu'il est une musique passionnante, est une musique terrestre, il suscite les mêmes enthousiasmes désintéressés, la même fièvre, la même ferveur, dans tous les pays du monde ; à cet égard, il est sans équivalent dans le domaine de la musique. Et c'est là peut-être son plus beau titre de gloire; c'est d'être, au-dessus des frontières, le lien de millions d'âmes naïves peut-être, mais de bonne volonté à coup sûr; ainsi, par un phénomène réconfortant, ce que de stupides critiques ont appelé “musique de sauvages” est devenu, de par le monde entier, la seule musique qui transcende les nationalités et les croyances, qui chasse les préjugés sous le formidable coup de balai de la détente et de la joie et qui mérite seule peut-être l'épithète de musique civilisée.
EN MANIÈRE DE CONCLUSION ET POUR NOUS RÉSUMER
Le jazz est une manière de jouer qui résulte de l'assimilation par un musicien d'une tradition constituée d'un ensemble d'apports créateurs conçus entre 1900 et l'époque actuelle, et matérialisée sous les espèces des disques et des arrangements.
Quiconque veut découvrir les joies que donne cette musique devra se pénétrer de tout ce qui a été réalisé jusqu'ici ; il serait surprenant qu'à force d'écouter il ne reçoive pas un jour ce choc déjà ressenti par des centaines de milliers de convertis et qui leur donne une raison de vivre de plus en même temps qu'elle leur réjouit fortement le corps et l'esprit. En matière de jazz comme en matière de peinture ou de littérature, le mieux n'est pas de bavarder, mais d'ouvrir ses yeux, ses oreilles et son entendement. La seule utilité de la critique, et qui n'est pas négligeable, est d'orienter l'auditeur vers ce qui lui semble le plus réussi et de le détourner du clinquant et de l'imitation. C'est ce que nous avons tenté, très brièvement, de faire ; et il est absolument superflu de retenir tout cela, puisque c'est imprimé et que vous le retrouverez quand vous voudrez. Et maintenant, auditeurs, à vos pick-up... La séance va commencer.
LEXIQUE DE QUELQUES-UNS DES TERMES COURANTS
Les musiciens de jazz utilisent fréquemment des termes qui n'ont pas d'équivalent en français et qui pour cette raison figurent tels quels dans les textes relatifs au jazz. D'un autre côté, le jazz a donné naissance à tout un argot spécialisé. Les Noirs, musiciens ou chanteurs, ou simplement amateurs, ont créé une “langue parallèle” le jive, qui apparaît souvent dans les magazines et les chansons. Nous indiquerons ici certains termes très courants, sans avoir la prétention d'épuiser le sujet. D'ailleurs, chaque jour, l'argot des jazzmen s'enrichit, comme tous les argots professionnels, de savoureuses trouvailles ; à vous de rester “in the know”, dans le coup, et dans le bain !
ALLIGATOR : fanatique du jazz ; aussi jitterbug (voir ce mot).
BACKGROUND : fond sonore.
BALL : employé dans l'expression Have a Ball : se payer du bon temps.
BARRELHOUSE : par allusion aux anciens cabarets minables de La Nouvelle-Orléans, musique de bas étage, de bastringue.
BEAT : temps d'une mesure, puis effet produit par le fait de le marquer : pulsation d'une musique.
BLOW : souffler. Par extension, jouer de n'importe quel instrument. On criera aussi bien à un pianiste : Blow, man blow ! (vas-y, vieux, rentre dedans !).
BLUES : Suite harmonique de douze mesures sur laquelle sont bâtis des centaines de thèmes mélodiques négro-américains.
BOOGIE-WOOGIE : “Style primitif de piano qui consiste à répéter à la main droite, sur un thème de blues, des figures mélodico-rythmiques très simples, tandis que la main gauche énonce un rythme caractéristique (croche pointée, double croche) et perpétuel” (André Hodeir, HOMMES ET PROBLÈMES DU JAZZ, op. cit.).
BOP ou BE-BOP : terme expliqué dans le texte.
BREAK : interruption du rythme d'un thème pendant laquelle le mélodique en train de jouer improvise une phrase de son choix.
BRIDGE ou PONT : la partie intermédiaire d'un thème.
CAT : Chat... ce qui veut dire musicien de jazz.
CHICK : abréviation de chicken, poulet, signifie : une fille.
CHORUS: refrain d'une chanson, généralement de 32 mesures. On improvise généralement sur le refrain, d'où l'expression “prendre un chorus”.
COMBO : petite formation instrumentale.
DIG : en jive, comprendre ou apprécier. En français, on dit parfois “tu digues ?”.
FEELING : sensibilité, sentiment.
GATE : un type.
GIMME SOME SKIN : en jive, “refile-moi un peu de peau”, serre-moi la main.
GROOVE : rainure ; s'emploie dans l'expression “in the groove” et signifie “bien parti”, en pleine forme.
GROWL : sonorité rauque, raclée obtenue sur certains instruments.
GUTBUCKET MUSIC : même sens ou à peu près que Barrel-house music.
HEP CAT : le gars qui sait tout. HIP : sophistiqué.
HIPSTER : celui qui est “hip”, à qui on n'apprend rien.
JAM : verbe ou nom, improviser ou improvisation.
JAM-SESSION : réunion de musiciens qui improvisent ensemble pour le plaisir. Dans l'argot des intoxiqués, réunion de fumeurs de marihuana.
JITTERBUG : fana de la danse.
LICK : phrase musicale très “hot”.
LONG-HAIR : chevelu ; se dit d'un qui préfère les classiques ou qui joue démodé. En français, on dit “ un barbu ”.
MELLOW : “au poil”.
REFFER : cigarette de marihuana.
RIFF : motif mélodique et rythmique répété à plusieurs reprises (nombreux exemples dans les disques de Count Basie).
ROCK : bercer. A pris un sens nettement érotique. S'emploie surtout maintenant dans l'expression “ Rock and Roll ” qui désigne une musique généralement basée sur les harmonies du blues, simple, brutale et efficace, caractérisée par une contrebasse qui “slape” ou fait claquer ses cordes sur le manche de l'instrument, et une batterie qui accentue le deuxième et le quatrième temps de chaque mesure.
RUG CUTTER : expression aujourd'hui un peu démodée qui signifie bon danseur.
SCHMALTZ : musique sirupeuse et “ toquarde ”.
SHARP : aigu, en argot signifie le gars vraiment “à la redresse”.
SLOW : lent, désigne aussi le morceau lent lui-même.
SOLID : “chouette”.
SQUARE : même sens que “long-hair”.
STANDARD : thème classique de la danse.
STRAIGHT : “comme c'est écrit”, et sans swing.
TEA : marihuana (il y a cent mots pour désigner la drogue. Un des plus récents est : “pot”).
VAMP : vieux style de trombone caractérisé par de puissants glissandos.
VIPER : fumeur de marihuana.
WEED : L'herbe (encore la marihuana. N'en concluez pas que nous vous en conseillons l'usage si
vous voulez “ piger ” le jazz, mais tous ces mots apparaissent fréquemment dans les titres des disques).
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE
Ouvrages écrits en français
Robert GOFFIN : Nouvelle histoire du jazz (Les Deux Sirènes, 1948)Bernard HEUVELMANS : De la Bamboula au be-bop (La Main jetée, 1951).
André HODEIR : Introduction à la musique de jazz (Larousse, 1948).
André HODEIR : Hommes et problèmes du jazz (Flammarion, 1954).
Lucien MALSON : Les Maîtres du jazz (Presses universitaires, 1952).
Hugues PANASSIÉ : La Véritable Musique de jazz (Robert Laffont).
Ouvrages traduits de l'anglais
Frederic RAMSEY et Ch. Ed. SMITH : Jazzmen (Flammarion).Barry ULANOV : Histoire du jazz (Corrêa).