article "Traditions musicales - Musique de l’Asie du Sud-Est" (Encyclopédie Universalis)
février 21, 2019
Prise de vue
L’influence de la Chine, relativement faible dans l’Asie du Sud-Est – c’est-à-dire les pays situés au sud de la Chine et à l’est de l’Inde : Birmanie, Thaïlande, Laos, Cambodge, Vietnam, Malaysia, Indonésie et Philippines –, se fait sentir surtout au Vietnam, placé sous la domination chinoise pendant presque mille ans du Ier au Xe siècle. Le Vietnam se rattache par sa tradition musicale au monde de civilisation chinoise, malgré quelques traces d’influence de l’Inde due à sa position géographique située au point de rencontre des deux courants de civilisations chinoise et indienne.Les autres pays, à part les Philippines, sont fortement hindouisés pour ce qui concerne la mythologie, les croyances, l’écriture, les thèmes des « théâtres d’ombre » et des drames dansés. Dans tous ces drames, les dieux, les héros, les personnages vertueux ou malfaisants, qu’ils soient hommes ou démons, proviennent des mêmes sources indiennes : le Ramayana et le Mahabharata (Sita, épouse du prince Rama, fut enlevée par Ravana, le roi des Démons, qui la séquestrait dans l’île de Lanka. Rama, aidé de son frère Lakshmana, s’allie à l’armée des Singes, commandée par Hanuman, pour aller délivrer Sita. La légende se termine par la mort du méchant Ravana).
Toutefois, sur le plan musical, à part quelques instruments indiens comme la harpe (qu’on retrouve sur les sculptures d’Angkor au Cambodge ; mais cet instrument a aujourd’hui disparu totalement au Cambodge comme en Inde) où l’ancienne vina (dont le nom pin reste encore utilisé au Cambodge pour désigner des instruments à cordes pincées et à laquelle est apparenté le sadev, monocorde cambodgien), à part encore quelques tambours, de petites cymbales (qui font partie des orchestres de danse en Thaïlande, au Laos, au Cambodge et à Bali) et la kachchapi vina (mentionnée dans des textes anciens en sanskrit et qui survit peut-être dans le kudjyapi des Philippines, l’ancien ketchapi javanais, le katchapi thaïlandais et peut-être le takhé thaïlandais et cambodgien), la musique de l’Inde a eu une influence relativement faible sur celle des pays de l’Asie du Sud-Est, dans laquelle ni les structures des échelles musicales ni le concept du raga n’ont été adoptés.
Les Philippines, après plus de trois siècles de contact culturel avec l’Espagne (1565-1898), ont subi l’influence de la musique espagnole et, selon José Maceda, les neuf dixièmes des Philippins environ exécutent à l’heure actuelle des chants avec danses, accompagnés à la guitare, au piano ou par un ensemble d’instruments à cordes du type des mandolines et des guitares appelé rondalla. Mais la musique des minorités ethniques des régions de Luzon, Mondoro, Palawan, Mindanao et Sulu, exécutée avec des gongs et des jeux de gongs, a une parenté évidente avec celle des îles d’Indonésie.
Tous les pays de l’Asie du Sud-Est – sauf le Vietnam et les Philippines –, en dehors du fait qu’ils sont hindouisés, présentent certains caractères communs, tant au point de vue des instruments et ensembles instrumentaux qu’au point de vue du langage musical, et peuvent être de ce fait groupés dans une grande famille musicale. Mais des particularités dans ces mêmes domaines font apparaître nettement deux branches : la branche thai-khmer, composée de la Thaïlande, du Cambodge, du Laos et de la Birmanie, et la branche malayo-indonésienne, composée de la Malaisie, de l’Indonésie et de quelques régions des Philippines.
1. Instruments et ensembles instrumentaux
Caractères communs et particularités
Les instruments sont pour la plupart à sons fixes, à « percussion mélodique », comme des xylophones (ranad en Thaïlande, roneat au Cambodge, rangnat au Laos, gambang kayer en Indonésie, gabbang aux Philippines), des jeux de gongs (khong wong en Thaïlande, khong vong au Laos, kong thom au Cambodge, ky-waing en Birmanie, bonang à Java, trompong à Bali, kulingtan aux Philippines), des métallophones (gender à Java ; pengender, kantil à Bali).D’autres instruments d’un même type se rencontrent dans ces différents pays : le hautbois, qui se nomme pinai en Thaïlande, sralay au Cambodge, hne en Birmanie, serunai en Malaisie, sarunai en Indonésie et saunay aux Philippines ; la vièle à pique à deux cordes (rebab en Malaisie et en Indonésie), à trois cordes (tro khmer au Cambodge, sau sam sai en Thaïlande) ; le tambour horizontal à deux peaux, frappé à mains nues (sampho cambodgien, kendang indonésien, gendang malais, gandang philippin).
Ces instruments ne se jouent pas en solo mais forment des ensembles comportant de nombreux exécutants : pi phat en Thaïlande, pin peat au Cambodge, seb nai au Laos, gamelan en Malaisie, à Java, gong à Bali, ensemble de kulingtan aux Philippines.
Par contre, si l’on trouve des jeux de gongs dans tous les pays de l’Asie du Sud-Est, les gongs bulbés, au nombre de seize ou dix-sept, posés horizontalement et suspendus par des lanières de cuir sur un cadre circulaire en rotin, se rencontrent seulement dans les pays de la branche thai-khmer (khong wong thaïlandais, kong thom cambodgien, khong vong laotien et ky-waing birman). Les mêmes types de gongs, dont le nombre varie de deux à douze, posés horizontalement, mais en suspension sur un cadre rectangulaire en bois, constituent des instruments particuliers aux pays de la branche malayo-indonésienne : chanang en Malaisie (deux gongs), kulingtan aux Philippines (de huit à onze gongs sur une rangée), trompong à Bali (douze gongs sur une rangée, joués par un musicien), riong à Bali (douze gongs sur une rangée, joués par quatre musiciens), bonang à Java (dix gongs sur deux rangées de cinq, joués par un musicien).
Les flûtes ne sont pas traversières, comme celles de l’Inde et des pays d’Extrême-Orient, mais droites (khouy thaïlandais et laotien, khloy cambodgien, pillu i birman), obliques (suling indonésien et suling philippin des régions de Mindanao, Magindanao, Sulu, etc.) ou nasales (kalleleng philippin des régions de Luzon et Bontoc).
Les orgues à bouche sont différents de ceux d’origine chinoise qui sont en faisceau ; les tuyaux ici se disposent en rangées parallèles (khène laotien) ou en rangées croisées (khim des Samrê du Cambodge, nboat des montagnards des Hauts Plateaux du Vietnam central, keluri dayak de Bornéo).
Quant aux cithares (sens générique désignant, selon André Schaeffner, des instruments dépourvus de manche dont les cordes sont tendues sur toute la longueur d’un corps de résonance – tuyau, tube, caisse – ou, à la rigueur, d’un morceau de bois cylindrique ou rectangulaire auquel est suspendu un résonateur), elles sont différentes par la forme, le nom et le nombre de cordes selon les pays : ta khé en Thaïlande et au Cambodge, magyaun en Birmanie, tjelempung à Java, kudjyapi des Philippines et sadev, monocorde cambodgien. On ne rencontre de luths qu’au Cambodge (chapey) et aux Philippines (kukyapi).
Seuls les pays du groupe thai-khmer ont des vièles à deux cordes semblables aux vièles chinoises ou vietnamiennes ; leur boîte de résonance est en bambou (tro chey cambodgien, tro birman, so i en Thaïlande et au Laos) ou en noix de coco (tro u cambodgien, so u en Thaïlande et au Laos).
Parmi les tambours dont la variété est grande, en dehors des tambours horizontaux à deux peaux déjà mentionnés, on peut citer : le tambour à une peau sur poterie (thung cambodgien, gedombak malais), semblable au tombak iranien ; le tambour à une peau à caisse en forme de tronc de cône allongé (skor chayam cambodgien) ; les tambours à deux peaux frappés à l’aide de bâtons en bois (skor cambodgien, laotien, thaïlandais, geduk malais) ; le tambour sur cadre à une peau (romanea cambodgien).
Enfin, les instruments à percussion de bois existent seulement chez les minorités ethniques des Philippines. Mais les gongs sont très variés dans les pays de l’Asie du Sud-Est, gongs de tailles différentes et généralement avec mamelon central, gongs simples ou par série de trois, de six ou de neuf, suspendus verticalement ou tenus par la main gauche, sans parler des jeux de petits gongs bulbés déjà mentionnés.
Ensembles instrumentaux
Chaque pays possède plusieurs ensembles instrumentaux différents correspondant à des usages déterminés: musique de divertissement de cour, musique de danses royales, musique pour les « théâtres d’ombres », musique de mariage, de funérailles, de cortège, de divertissement populaire, etc.On peut se limiter à examiner quatre types principaux d’orchestres de cour : l’orchestre pin peat et l’orchestre mohori (Cambodge), le gamelan (Java) et le gong (Bali) ; les deux premiers n’existent que dans le groupe thai-khmer.
– Les ensembles pin peat (cambodgien), pi phat (thaïlandais et birman) et seb nai (laotien) ont, à quelques détails près, la même composition ; leurs instruments sont presque toujours par paires, l’un pour le registre aigu, l’autre pour le grave.
À titre d’exemple, voici la composition de l’orchestre pin peat du Cambodge, d’après les renseignements donnés par Jacques Brunet : deux xylophones (roneat touch [prononcez toueut], xylophone aigu, ou roneat ek, premier xylophone à vingt et une lames ; roneat thung, grave, à dix-sept lames) ; deux jeux de gongs sur cadre circulaire en rotin (kong touch, aigu à dix-sept gongs ; kong thom, grave, à seize gongs) ; deux hautbois (sralay touch et sralay thom ; mais, dans la plupart des ensembles, il n’y a qu’un hautbois); deux tambours à deux peaux frappés à l’aide de bâtonnets en bois (skor thom) ; un ou deux tambours horizontaux à deux peaux, frappés à main nue (sampho) ; une paire de petites cymbales (chhing) ; quelquefois enfin, un métallophone (roneat dek). Selon les cas et les pays, le nombre d’instruments de chaque catégorie peut être modifié.
Le pin peat (ou le pi phat) sert pour la musique de cour, les cérémonies, l’accompagnement des drames dansés ou des danses royales.
– L’orchestre mahori, également du groupe thai-khmer, comprend de surcroît des instruments à cordes. Voici, à titre d’exemple, l’ensemble mahori du Cambodge : deux xylophones (aigu et grave) ; une cithare à trois cordes (ta khé) ; une vièle à pique à trois cordes (tro khmer) ; deux flûtes droites (khloy touch et khloy thom) ; deux tambours joués par le même musicien (thung et romanea). Dans certains cas, le monocorde sadev et le luth chapey, ainsi que les petites cymbales, peuvent faire partie de cet ensemble qui joue la musique de divertissement. Au Laos, on ajoute souvent le khène, orgue à bouche.
Les deux autres types étudiés ici existent à Java (gamelan) et à Bali (gong). La composition des gamelans et des gongs est variable selon les régions et les genres de musique.
– Un gamelan à Java comporte, en général (d’après Jaap Kunst) : des instruments donnant la mélodie principale, des instruments dits « colotomiques », des instruments paraphrasants, enfin des instruments « agogiques ».
Le groupe des saron demung et saron barung (métallophones à six lames) donne la mélodie principale; dans les grandes compositions, une mélodie plus élaborée est exécutée sur les bonang (jeu de dix gongs disposés en deux rangées sur cadre rectangulaire en bois); pour les pièces de musique douce, elle est exécutée par la flûte suling, la vièle rebab ou la voix soutenue par un chœur chantant à l’unisson. La mélodie essentielle est soulignée à distances égales par des coups sur le slentem (métallophone sur résonateurs).
Les instruments dits « colotomiques » marquent la ponctuation. À la fin de chaque partie de la pièce, on frappe le plus grand gong suspendu verticalement, appelé gong ageng ou gong gedé ; ce coup équivaut à un point, et même à un point à la ligne. Chaque partie ou chaque longue phrase est subdivisée en courtes phrases à la fin desquelles on fait sonner le kenong, le grand gong posé sur cadre carré en bois ; un coup de kenong équivaut à un point-virgule. Chaque phrase est divisée en périodes marquées par un coup de ketuk, petit gong bulbé posé sur un cadre carré en bois ; chaque coup de ketuk équivaut à une virgule.
Les instruments paraphrasants exécutent de « belles paraphrases » ornées par des « arabesques musicales » : ce sont les gender, métallophones à quatorze lames posées sur résonateurs ; le gambang raju, xylophone à vingt lames de bois ; le tjelempung, cithare à treize cordes doubles pincées à l’aide des deux pouces.
Les instruments agogiques, enfin, marquent le tempo et le rythme, tel le tambour à deux peaux frappé à main nue, le kendang, joué généralement par le musicien conducteur. Les instruments du gamelan vont par paires, mais, dans certains cas, le nombre de tel ou tel instrument peut être modifié.
– L’ensemble instrumental de Bali se nomme gong. D’après Jacques Brunet, qui a enregistré plusieurs pièces de musique à Bali en août 1970, l’ensemble gong gdé (« grand et noble ») se compose de : deux métallophones à dix lames (pengugal) ; huit métallophones à dix lames (pengender) ; quatre métallophones à dix lames (kantil) ; deux métallophones à cinq lames (kinjur) ; deux métallophones à cinq lames (djublag) ; deux métallophones à six lames aux sons graves (djegogan) ; un jeu de douze gongs posés en une rangée sur cadre rectangulaire en bois, joué par un musicien (trompong) ; un grand gong suspendu verticalement (gong) ; un gong moyen suspendu verticalement (kempul) ; un petit gong sur un cadre en bois (ketuk) ; deux tambours à deux peaux frappés à main nue (kendang) ; une paire de petites cymbales (tjeng tjeng) ; six flûtes obliques (suling).
Deux particularités sont à signaler dans le jeu des instruments à Bali : dans certains ensembles, tel le gong kebyar, il existe un jeu de douze gongs posés sur un cadre rectangulaire et joué par quatre musiciens, c’est le riong ; d’autre part, on amortit toujours les vibrations des lames des métallophones en les saisissant entre le pouce et l’index de la main gauche.
Ce sont surtout des échelles pentatoniques ou dont les structures sont pentatoniques, malgré la présence de sept degrés dans une octave (échelle « équiheptatonique » thai-khmer, échelle pelog de Java). Du reste, dans plusieurs exemples musicaux, une certaine parenté se dégage entre ces deux échelles.
Les instruments à sons fixes des orchestres de cour en Thaïlande, au Cambodge et au Laos ont été accordés, depuis une cinquantaine d’années, plus ou moins d’après la gamme tempérée de l’Occident, ce qui est dommage, car, avec l’échelle équiheptatonique, les musiciens pouvaient prendre n’importe quel degré comme fondamental pour jouer une mélodie sans changer la structure des échelles, puisque les degrés seraient équidistants.
Selon Duriyana Pra Chen et David Morton, en Thaïlande, on n’utilise le quatrième degré que pour une « modulation » ou, mieux, une « métabole » (c’est-à-dire un passage d’un type d’échelle à un autre, avec ou sans retour au premier), et le septième degré à titre de note de passage. L’échelle la plus communément utilisée serait la pentatonique : 1, 2, 3, 5, 6, 8 (à peu près : do, ré-, mi-, sol-, la-, do) avec la tierce do, mi- sensiblement égale à la tierce neutre. Au Cambodge et au Laos, on rencontre d’autres échelles pentatoniques avec deux degrés auxiliaires utilisés comme notes ornementales ou notes de passage. Les exemples de métabole sont très nombreux; les meilleurs ensembles sont ceux qui arrivent à utiliser le plus de métaboles possibles dans l’exécution d’une pièce.
L’échelle de la figure, donnée par Jaap Kunst, est une des échelles pelog. Les autres échelles se rapprocheraient plus ou moins de cette échelle prise comme exemple, une échelle dont la formation ne peut être expliquée ni par le cycle des quintes, ni par la résonance, ni par l’adjonction des tétracordes, ni par l’égalisation. D’après les croyances populaires en Indonésie, elle proviendrait de la modification de l’échelle céleste, le slendro, par des musiciens irrévérencieux. Elle ressemble à l’échelle « équiheptatonique » par la structure.
Une différence de l’ordre de 24 cents (un comma pythagoricien) n’est pas perceptible par une oreille non exercée. N’oublions pas non plus qu’en Asie la marge de tolérance est plus grande qu’en Occident. Les échelles en usage à Bali et à Sunda sont d’un type encore différent et les noms des degrés sont : ding, grand dong, grand dang, deng, dung, petit dang, petit dong (« grand » équivaut à grave et se dit ageng ou gedé, « petit » équivaut à aigu et se dit alit ou tjenik).
En revanche, le concept du patet à Java présente selon M. Hood les caractères fondamentaux d’un « mode » : l’existence d’une échelle caractéristique (l’une des six échelles de base : trois échelles slendro et trois échelles pelog) ; la hiérarchie des degrés (pour chaque patet, le degré le plus important est le dasar, puis viennent dans l’ordre le premier gong et le second gong) ; l’existence d’une formule mélodique (à part la mélodie fixe de chaque patet, il y a des formules de cadences) ; le sentiment modal (chacun des trois patet de chaque type d’échelle est associé avec l’une des trois périodes des représentations de théâtre d’ombres, qui correspondent à certaines heures du jour et de la nuit).
En Indonésie, les règles sont un peu plus strictes, surtout dans la musique de Bali. Par la facture des instruments et la composition des ensembles, plusieurs lignes mélodiques à partir d’une cellule mélodique se déroulent simultanément. Il n’existe pas de structures harmoniques comme en Occident, mais un certain type de contrepoint n’est pas exclu.
Dans la musique de Java, une pièce orchestrale, appelée gending, se compose d’une courte introduction appelée bubuka opaq-opag et de deux parties : le mérong, appelé par Mantle Hood mouvement d’introduction, et le munggah (mouvement principal). Les gending sont conçues pour mettre en valeur un instrument de l’orchestre, le bonang ou le rebab par exemple. Une composition type pour le gambuh, ou « opéra balinais », comporte une introduction (pengalihan), une partie principale (pengawak) et une sorte de coda (pemilpil).
– Un gamelan à Java comporte, en général (d’après Jaap Kunst) : des instruments donnant la mélodie principale, des instruments dits « colotomiques », des instruments paraphrasants, enfin des instruments « agogiques ».
Le groupe des saron demung et saron barung (métallophones à six lames) donne la mélodie principale; dans les grandes compositions, une mélodie plus élaborée est exécutée sur les bonang (jeu de dix gongs disposés en deux rangées sur cadre rectangulaire en bois); pour les pièces de musique douce, elle est exécutée par la flûte suling, la vièle rebab ou la voix soutenue par un chœur chantant à l’unisson. La mélodie essentielle est soulignée à distances égales par des coups sur le slentem (métallophone sur résonateurs).
Les instruments dits « colotomiques » marquent la ponctuation. À la fin de chaque partie de la pièce, on frappe le plus grand gong suspendu verticalement, appelé gong ageng ou gong gedé ; ce coup équivaut à un point, et même à un point à la ligne. Chaque partie ou chaque longue phrase est subdivisée en courtes phrases à la fin desquelles on fait sonner le kenong, le grand gong posé sur cadre carré en bois ; un coup de kenong équivaut à un point-virgule. Chaque phrase est divisée en périodes marquées par un coup de ketuk, petit gong bulbé posé sur un cadre carré en bois ; chaque coup de ketuk équivaut à une virgule.
Les instruments paraphrasants exécutent de « belles paraphrases » ornées par des « arabesques musicales » : ce sont les gender, métallophones à quatorze lames posées sur résonateurs ; le gambang raju, xylophone à vingt lames de bois ; le tjelempung, cithare à treize cordes doubles pincées à l’aide des deux pouces.
Les instruments agogiques, enfin, marquent le tempo et le rythme, tel le tambour à deux peaux frappé à main nue, le kendang, joué généralement par le musicien conducteur. Les instruments du gamelan vont par paires, mais, dans certains cas, le nombre de tel ou tel instrument peut être modifié.
– L’ensemble instrumental de Bali se nomme gong. D’après Jacques Brunet, qui a enregistré plusieurs pièces de musique à Bali en août 1970, l’ensemble gong gdé (« grand et noble ») se compose de : deux métallophones à dix lames (pengugal) ; huit métallophones à dix lames (pengender) ; quatre métallophones à dix lames (kantil) ; deux métallophones à cinq lames (kinjur) ; deux métallophones à cinq lames (djublag) ; deux métallophones à six lames aux sons graves (djegogan) ; un jeu de douze gongs posés en une rangée sur cadre rectangulaire en bois, joué par un musicien (trompong) ; un grand gong suspendu verticalement (gong) ; un gong moyen suspendu verticalement (kempul) ; un petit gong sur un cadre en bois (ketuk) ; deux tambours à deux peaux frappés à main nue (kendang) ; une paire de petites cymbales (tjeng tjeng) ; six flûtes obliques (suling).
Deux particularités sont à signaler dans le jeu des instruments à Bali : dans certains ensembles, tel le gong kebyar, il existe un jeu de douze gongs posés sur un cadre rectangulaire et joué par quatre musiciens, c’est le riong ; d’autre part, on amortit toujours les vibrations des lames des métallophones en les saisissant entre le pouce et l’index de la main gauche.
2. Les échelles théoriques
Caractères communs
Les échelles théoriques fondamentales en usage dans les pays de l’Asie du Sud-Est ne peuvent être reconstituées par le cycle des quintes comme celles des pays d’Extrême-Orient, ni par l’adjonction des tétracordes comme celles des pays du monde turco-arabo-persan. Elles ont été obtenues par le principe d’égalisation. L’octave est divisée théoriquement en sept parties égales dans la tradition thai-khmer, en cinq parties égales en Indonésie.Ce sont surtout des échelles pentatoniques ou dont les structures sont pentatoniques, malgré la présence de sept degrés dans une octave (échelle « équiheptatonique » thai-khmer, échelle pelog de Java). Du reste, dans plusieurs exemples musicaux, une certaine parenté se dégage entre ces deux échelles.
Caractères particuliers
Échelle « équiheptatonique »
L’échelle théorique de base en usage dans les pays du groupe thai-khmer est obtenue par la division de l’octave en sept intervalles égaux. En fait, on ne trouve pas d’échelles qui correspondent rigoureusement à l’échelle théorique de base, mais elles s’en rapprochent.Les instruments à sons fixes des orchestres de cour en Thaïlande, au Cambodge et au Laos ont été accordés, depuis une cinquantaine d’années, plus ou moins d’après la gamme tempérée de l’Occident, ce qui est dommage, car, avec l’échelle équiheptatonique, les musiciens pouvaient prendre n’importe quel degré comme fondamental pour jouer une mélodie sans changer la structure des échelles, puisque les degrés seraient équidistants.
Selon Duriyana Pra Chen et David Morton, en Thaïlande, on n’utilise le quatrième degré que pour une « modulation » ou, mieux, une « métabole » (c’est-à-dire un passage d’un type d’échelle à un autre, avec ou sans retour au premier), et le septième degré à titre de note de passage. L’échelle la plus communément utilisée serait la pentatonique : 1, 2, 3, 5, 6, 8 (à peu près : do, ré-, mi-, sol-, la-, do) avec la tierce do, mi- sensiblement égale à la tierce neutre. Au Cambodge et au Laos, on rencontre d’autres échelles pentatoniques avec deux degrés auxiliaires utilisés comme notes ornementales ou notes de passage. Les exemples de métabole sont très nombreux; les meilleurs ensembles sont ceux qui arrivent à utiliser le plus de métaboles possibles dans l’exécution d’une pièce.
Échelles « slendro » et « pélog »
À Java, l’échelle slendro théorique se compose de cinq degrés presque équidistants. En fait, on rencontre surtout des intervalles dont les valeurs se rapprochent de 240 cents (rappelons qu’un ton tempéré dans la musique occidentale équivaut à 200 cents). L’échelle slendro a un caractère masculin et grave, et non féminin et doux comme le pélog.L’échelle de la figure, donnée par Jaap Kunst, est une des échelles pelog. Les autres échelles se rapprocheraient plus ou moins de cette échelle prise comme exemple, une échelle dont la formation ne peut être expliquée ni par le cycle des quintes, ni par la résonance, ni par l’adjonction des tétracordes, ni par l’égalisation. D’après les croyances populaires en Indonésie, elle proviendrait de la modification de l’échelle céleste, le slendro, par des musiciens irrévérencieux. Elle ressemble à l’échelle « équiheptatonique » par la structure.
Une différence de l’ordre de 24 cents (un comma pythagoricien) n’est pas perceptible par une oreille non exercée. N’oublions pas non plus qu’en Asie la marge de tolérance est plus grande qu’en Occident. Les échelles en usage à Bali et à Sunda sont d’un type encore différent et les noms des degrés sont : ding, grand dong, grand dang, deng, dung, petit dang, petit dong (« grand » équivaut à grave et se dit ageng ou gedé, « petit » équivaut à aigu et se dit alit ou tjenik).
3. Particularités du langage musical
La conception du « mode »
Selon Morton pour la Thaïlande et Jacques Brunet pour le Cambodge, il n’existe pas de notion de « mode » comparable à celle du raga de l’Inde ou du maqam des pays arabes. L’ethos n’est pas pris en considération. Au Cambodge, les chants alternés gais et alertes peuvent utiliser la même échelle que la musique triste.En revanche, le concept du patet à Java présente selon M. Hood les caractères fondamentaux d’un « mode » : l’existence d’une échelle caractéristique (l’une des six échelles de base : trois échelles slendro et trois échelles pelog) ; la hiérarchie des degrés (pour chaque patet, le degré le plus important est le dasar, puis viennent dans l’ordre le premier gong et le second gong) ; l’existence d’une formule mélodique (à part la mélodie fixe de chaque patet, il y a des formules de cadences) ; le sentiment modal (chacun des trois patet de chaque type d’échelle est associé avec l’une des trois périodes des représentations de théâtre d’ombres, qui correspondent à certaines heures du jour et de la nuit).
La polyphonie
Dans la musique orchestrale des pays de l’Asie du Sud-Est, on entend souvent simultanément des sons de hauteur différente. Peut-on parler de « polyphonie » ? Non, si l’on comprend ce mot dans le sens occidental. Mantle Hood et Morton ont utilisé l’expression « stratification polyphonique ». D’autres musicologues ont préféré les termes « polymélodie » ou « hétérophonie ». Le souci de faire entendre deux sons de hauteurs différentes est certain. Dans l’ancienne tradition khmer, les joueurs de xylophone faisaient entendre deux sons distants d’une octave l’un de l’autre. Les joueurs thaïlandais font entendre la quinte ou la quarte. Selon Brunet, lorsque les musiciens cambodgiens jouent dans un ensemble, chacun cherche à trouver la formule qui lui plaît, à partir d’une mélodie connue de tout le monde : « Chacun va ainsi son propre chemin pour se retrouver avec les autres de temps en temps.»En Indonésie, les règles sont un peu plus strictes, surtout dans la musique de Bali. Par la facture des instruments et la composition des ensembles, plusieurs lignes mélodiques à partir d’une cellule mélodique se déroulent simultanément. Il n’existe pas de structures harmoniques comme en Occident, mais un certain type de contrepoint n’est pas exclu.
Le rythme
Le rythme ternaire est presque inexistant dans la musique savante. Les mesures à deux ou à quatre temps sont les plus courantes. Il existe trois tempi : lent, modéré et rapide. Sauf dans la musique de Bali, caractérisée par le contraste soudain dans le tempo et dans la dynamique, le rythme en général paraît uniforme ; il est ponctué par plusieurs instruments à percussion qui divisent le discours en plusieurs périodes ; chaque phrase musicale est très carrée et la fin en est indiquée par une percussion. Les joueurs de tambours horizontaux à deux peaux frappés à main nue (sampho au Cambodge, kendang en Indonésie) doivent connaître plusieurs formules rythmiques élaborées qu’ils mémorisent par des onomatopées représentant les timbres des frappes, comme cela se fait en Inde.La forme des pièces
Dans le groupe thai-khmer, aucune forme fixe n’a été signalée. Selon Morton, dans la musique instrumentale de Thaïlande, les phrases musicales comportent deux ou quatre « mesures » qu’il appelle phrase-units. Quatre de ces phrase-units forment une unité appelée phrase-block (phrase musicale). Chaque pièce comporte un certain nombre de phrase-blocks. Une mélodie donnée a toujours trois versions : originale, longue et courte. Elle est exécutée dans l’ordre suivant : version longue, version originale et version courte.Dans la musique de Java, une pièce orchestrale, appelée gending, se compose d’une courte introduction appelée bubuka opaq-opag et de deux parties : le mérong, appelé par Mantle Hood mouvement d’introduction, et le munggah (mouvement principal). Les gending sont conçues pour mettre en valeur un instrument de l’orchestre, le bonang ou le rebab par exemple. Une composition type pour le gambuh, ou « opéra balinais », comporte une introduction (pengalihan), une partie principale (pengawak) et une sorte de coda (pemilpil).
4. Genres et orchestres
Dans tous les pays de l’Asie du Sud-Est, il existe une musique populaire qui accompagne les faits et gestes de tous les jours. Souvent vocale, elle est exécutée par les travailleurs, paysans, pêcheurs ou artisans. La musique instrumentale, exécutée à l’occasion des mariages, des funérailles ou des fêtes saisonnières, diffère de la musique savante de cour, surtout par le nombre d’instruments constitués en ensembles et par le niveau artistique des musiciens. Mais, très souvent, la musique « paysanne » a le même répertoire que la musique « royale » ; c’est le cas au Cambodge.
La musique de tradition savante est une musique d’orchestre. Les ensembles déjà cités sont les plus courants. Mais en Thaïlande, en dehors de l’orchestre pi phat et de l’orchestre mahori semblable au mohori cambodgien, il existe un autre ensemble, khruang sai, composé d’instruments à cordes, d’une flûte de bambou et d’instruments à percussion. Au Cambodge, en dehors des ensembles pin peat et mohori, on peut citer encore l’ensemble phleng khmer pour la musique de mariage ou la musique de cérémonie en l’honneur des génies, le phleng kong-skor pour l’incinération des corps des défunts, le khang chnak pour le cortège funèbre, le khlang khêk pour des séances de boxe.
Les mots gamelan à Java et gong à Bali sont plutôt des termes génériques désignant des ensembles instrumentaux plus ou moins importants, dont les fonctions et les styles musicaux varient d’une région à l’autre.
Ces grands ensembles jouaient une musique de divertissement de cour, qui accompagnait les drames dansés. Dans le peuple, les spectacles les plus populaires sont les « théâtres d’ombres » : nang sbek et syang au Cambodge, wayang en Malaisie et en Indonésie.
Aux Philippines, l’ensemble instrumental le plus populaire est le rondalla, composé uniquement d’instruments à cordes pincées du type des guitares espagnoles : banduria à six cordes doubles accordées à la quarte; laud semblable au banduria mais avec un manche plus long, une caisse plus large et un registre plus grave ; octavina ressemblant à une petite guitare ; guitare philippine, résultant d’un mélange de guitare espagnole et de kudyapi, luth philippin à cinq cordes accordées mi, la, ré, sol, si ; bajo, basse à quatre cordes (mi, la, ré, sol).
Cet ensemble joue des chansons et des danses qui portent la marque de l’influence espagnole. Aux Philippines, la musique occidentale, enseignée dans plusieurs conservatoires, est exécutée par des orchestres symphoniques, parmi lesquels le Manila Symphony Orchestra fondé en 1926. Leurs répertoires comportent non seulement les œuvres classiques de l’Occident, mais aussi celles de compositeurs philippins, tels Abelardo Nicanor, Buenaventura Antonino, Kasilag Lucrecia, Molina Antonio, Pájaro Eliseo, San Pedro Lucio, Tapales Ramón. Mais des orchestres avaient été créés dès la fin du XIXe siècle et c’est même en 1601 que le premier orchestre de type occidental joua au couvent de Nuestra Señora de Guadalupe.
Dans les autres pays de l’Asie du Sud-Est, la musique occidentale n’est pas appréciée. En Thaïlande et au Cambodge, sous l’influence des musiciens occidentaux qui dirigeaient les orchestres de cour, les xylophones et les jeux de gongs ont été « réaccordés » plus ou moins d’après la gamme tempérée. Les souverains et dirigeants politiques de ces deux pays, étant donné leur goût pour la musique de jazz ou de danse de l’Occident, ont donné le ton aux jeunes musiciens: une nouvelle musique hybride est née; elle se répand grâce à la radiodiffusion. Heureusement, en Indonésie, plusieurs centaines de gamelan et de gong continuent à exécuter la musique traditionnelle.
En Asie du Sud-Est comme dans la plupart des pays non industrialisés, l’ancienne tradition musicale, avec son long passé, ses règles achevées, ses formes définies, s’efface devant la « musique nouvelle » qui cherche sa voie, ou la musique occidentale qui tend à s’imposer ; elle est mal défendue par les vieux maîtres, ceux-ci refusant de transmettre leur art à des jeunes qui, à leurs yeux, sont incapables de le comprendre, ou s’enfermant dans leur tour d’ivoire, hostiles à toute évolution. Les jeunes ou bien adoptent la musique occidentale et renient leur passé, ou bien cherchent un compromis, confondant progrès avec occidentalisation, et donnent naissance à une musique hybride dont la valeur artistique laisse à désirer.
Dans un monde qui évolue, la musique ne peut pas rester immuable. Mais le travail de rénovation doit être accompli par des jeunes musiciens qui connaissent à fond et les éléments traditionnels et les éléments d’emprunt. Vouloir rénover une tradition en y apportant des éléments incompatibles avec sa véritable nature, c’est la détruire. Malheureusement, partout, la diversité et l’originalité font place à l’uniformité et à la standardisation. Si les jeunes musiciens asiatiques ne prennent pas conscience de la valeur du patrimoine musical légué par leurs ancêtres, celui-ci risque de se perdre à jamais.
Les mots gamelan à Java et gong à Bali sont plutôt des termes génériques désignant des ensembles instrumentaux plus ou moins importants, dont les fonctions et les styles musicaux varient d’une région à l’autre.
Ces grands ensembles jouaient une musique de divertissement de cour, qui accompagnait les drames dansés. Dans le peuple, les spectacles les plus populaires sont les « théâtres d’ombres » : nang sbek et syang au Cambodge, wayang en Malaisie et en Indonésie.
Aux Philippines, l’ensemble instrumental le plus populaire est le rondalla, composé uniquement d’instruments à cordes pincées du type des guitares espagnoles : banduria à six cordes doubles accordées à la quarte; laud semblable au banduria mais avec un manche plus long, une caisse plus large et un registre plus grave ; octavina ressemblant à une petite guitare ; guitare philippine, résultant d’un mélange de guitare espagnole et de kudyapi, luth philippin à cinq cordes accordées mi, la, ré, sol, si ; bajo, basse à quatre cordes (mi, la, ré, sol).
Cet ensemble joue des chansons et des danses qui portent la marque de l’influence espagnole. Aux Philippines, la musique occidentale, enseignée dans plusieurs conservatoires, est exécutée par des orchestres symphoniques, parmi lesquels le Manila Symphony Orchestra fondé en 1926. Leurs répertoires comportent non seulement les œuvres classiques de l’Occident, mais aussi celles de compositeurs philippins, tels Abelardo Nicanor, Buenaventura Antonino, Kasilag Lucrecia, Molina Antonio, Pájaro Eliseo, San Pedro Lucio, Tapales Ramón. Mais des orchestres avaient été créés dès la fin du XIXe siècle et c’est même en 1601 que le premier orchestre de type occidental joua au couvent de Nuestra Señora de Guadalupe.
Dans les autres pays de l’Asie du Sud-Est, la musique occidentale n’est pas appréciée. En Thaïlande et au Cambodge, sous l’influence des musiciens occidentaux qui dirigeaient les orchestres de cour, les xylophones et les jeux de gongs ont été « réaccordés » plus ou moins d’après la gamme tempérée. Les souverains et dirigeants politiques de ces deux pays, étant donné leur goût pour la musique de jazz ou de danse de l’Occident, ont donné le ton aux jeunes musiciens: une nouvelle musique hybride est née; elle se répand grâce à la radiodiffusion. Heureusement, en Indonésie, plusieurs centaines de gamelan et de gong continuent à exécuter la musique traditionnelle.
En Asie du Sud-Est comme dans la plupart des pays non industrialisés, l’ancienne tradition musicale, avec son long passé, ses règles achevées, ses formes définies, s’efface devant la « musique nouvelle » qui cherche sa voie, ou la musique occidentale qui tend à s’imposer ; elle est mal défendue par les vieux maîtres, ceux-ci refusant de transmettre leur art à des jeunes qui, à leurs yeux, sont incapables de le comprendre, ou s’enfermant dans leur tour d’ivoire, hostiles à toute évolution. Les jeunes ou bien adoptent la musique occidentale et renient leur passé, ou bien cherchent un compromis, confondant progrès avec occidentalisation, et donnent naissance à une musique hybride dont la valeur artistique laisse à désirer.
Dans un monde qui évolue, la musique ne peut pas rester immuable. Mais le travail de rénovation doit être accompli par des jeunes musiciens qui connaissent à fond et les éléments traditionnels et les éléments d’emprunt. Vouloir rénover une tradition en y apportant des éléments incompatibles avec sa véritable nature, c’est la détruire. Malheureusement, partout, la diversité et l’originalité font place à l’uniformité et à la standardisation. Si les jeunes musiciens asiatiques ne prennent pas conscience de la valeur du patrimoine musical légué par leurs ancêtres, celui-ci risque de se perdre à jamais.
© Texte extrait de l'article "Traditions musicales - Musique de l’Asie du Sud-est" in Encyclopédie Universalis.